Inondations de juillet 2021 : bilan au niveau des couvertures et des assurances

Assurance

Inondations de juillet 2021 : bilan au niveau des couvertures et des assurances

8 mois après les inondations qui ont frappé la Wallonie, quelque 70.000 dossiers ont été introduits auprès des compagnies d’assurances.

On estime que la catastrophe naturelle des inondations exceptionnelles du 14 au 16 juillet a occasionné des dégâts pour un montant compris entre 1,7 et 2,5 milliards d’euros.

Une meilleure prévention et une anticipation des crises seront plus que jamais nécessaires à l’avenir.

Mécanisme d’intervention : les limites de la législation

La loi du 17 septembre 2005 a modifié la législation sur le contrat d’assurance terrestre (loi du 25/06/1992) et celle sur la Caisse des calamités (loi du 12/07/1976) en vue de la couverture des catastrophes naturelles.

Jusqu’au 1er mars 2006, les victimes d’une inondation, d’un tremblement de terre ou d’un autre événement similaire devaient attendre qu’un arrêté royal reconnaisse cet événement comme catastrophe naturelle et délimite les zones sinistrées. Ensuite, les victimes pouvaient être indemnisées, partiellement, par la Caisse des calamités. La procédure pouvait donc être longue et s’est révélée particulièrement inefficace.

Depuis le 2 mars 2006, l’indemnisation des catastrophes naturelles s’effectue dans le cadre de l’assurance incendie. La couverture catastrophes naturelles concerne tant les propriétaires que les locataires.

Cette législation a donc apporté une solution pour remplacer le très pauvre et très limité « Fond des Calamités » dans un soucis de protéger les assurés en cas d’évènement majeur.

Cette Loi Fédérale a cependant limité les indemnités d’intervention pour éviter la banqueroute des assureurs en cas d’énorme catastrophe.  Grosso modo, les compagnies indemnisent les assurés grâce à l’argent de l’ensemble des primes payées selon le principe immuable de la mutualisation.  En cas de catastrophe de grande ampleur, il serait en effet impossible aux assureurs de payer la globalité de la facture des dégâts, raison pour laquelle la législation a plafonné le montant total des interventions lors d’un sinistre.

Pour la Wallonie, l’intervention des assureurs a été limitée à un total de 350 millions et ce montant sert donc de plafond pour l’ensemble des habitations et des petits commerces touchés par les intempéries du 14 au 16 juillet 2021.

Il est important de noter que cette législation est rendue obligatoire pour la couverture de ce que les assureurs appellent les « risques simples » c’est-à-dire les bâtiments de particulier et les petits commerces.  Les autres risques dits « Spéciaux » ne sont par conséquent pas visés et sont donc liés directement aux conditions particulières de leur contrat d’assurance : les catastrophes naturelles sont dès lors des « extensions de couvertures » prévues ou non dans ces contrats.

Nouvelle répartition des efforts entre assureurs et gouvernement wallon

Face à l’ampleur de cette catastrophe essentiellement régionale, un accord est intervenu entre les assureurs et le gouvernement wallon pour partager les efforts afin que les personnes sinistrées puissent être indemnisées à 100 % conformément aux conditions de leur contrat d’assurance.

Pour y parvenir les assureurs ont dérogés à la limite du plafond légal en portant leur intervention à 590 millions d’euros.

La région wallonne, de son côté, prendra en charge la différence entre cette intervention de 590 millions d’euros et les montants qui seront nécessaires pour indemniser les sinistrés à 100 %.

Il ne faut pas être un grand économiste pour imaginer qu’après la gestion de crise du Covid, la facture des inondations aggravera de manière abyssale la dette du gouvernement wallon.

La solution actuellement retenue pour que la région dispose de fonds pour indemniser les assurés sinistrés et reconstruire les infrastructures détruites a été négociées à travers des emprunts à 0% aux compagnies d’assurances.

C’est une solution « pour éviter que la Région wallonne ne soit dans d’énormes difficultés financières », explique Elio Di Rupo, le ministre-président wallon.

Décret du Parlement Wallon du 23/09/2021 : les assureurs seuls à la manœuvre

Le gouvernement wallon a institué un régime particulier d’indemnisation des dommages par les inondations du 14 au 16 juillet 2021 reconnues en tant que calamité naturelle publique.

Par ce décret, le gouvernement Wallon a fait en sorte que les personnes (physiques ou morales) propriétaires de biens immobiliers ou mobiliers, assurées OU non, bénéficient de l’aide à la réparation.

Cette intervention est supplétive à toutes indemnités perçues ou à percevoir pour des biens assurés par les polices d’assurance.

L’article 35 du décret précise que les assureurs seront les interlocuteurs centraux de tous les sinistrés. Les sinistrés assurés pourront ainsi compter sur une indemnisation complète pour qu’ils puissent reconstruire.   La limite Légale du plafond ne leur sera donc pas opposable.

Les assureurs disposent d’un recours subrogatoire contre la Région wallonne pour les montants supérieurs à leurs limites d’interventions.

Bilan

Le bilan des graves inondations de l’été dernier a été particulièrement lourd sur le plan humain et matériel. Au total, le secteur de l’assurance a dû faire face à plus de 74.000 demandes d’indemnisation de victimes.

Bien assister chaque victime dans chaque dossier reste une priorité. ​

A ce jour, les assureurs ont versé plus d’1 milliard d’euros aux victimes de la catastrophe, plus de 60 % des dossiers ayant fait l’objet d’une clôture administrative. Des dossiers en cours restent ouverts en raison du fait que l’ampleur du dommage peut encore croître (exemple : les bâtiments qui ne sont pas encore complètement secs), des contre-expertises sont demandées ou des estimations d’entrepreneurs et d’autres réparateurs n’arrivent qu’au compte-goutte.

Pour bien comprendre le phénomène, en 2019 le coût moyen des sinistres inondation déclarés s’élevait à 3.865 euros pour un total sur l’année de 330 millions d’euros.  Pour l’année 2021, le coût moyen est passé à 30.000 euros et le coût total reste estimé à plus de 2,57 milliards d’euros.

Et demain ?

Le rapport annuel d’Assuralia exprime un très net avertissement au monde de l’assurance.  Son CEO Hein Lannoy met en garde :

« Le monde a changé et nous devons réfléchir conjointement avec les autorités à une solution durable pour continuer à couvrir ces risques dans le futur, moyennant une prime acceptable pour les assurés. Outre la prise en charge du risque climatique, garantir une pension décente et offrir des couvertures soins de santé étendues est également une nécessité. Là aussi, le secteur de l’assurance a un rôle important à jouer. »

Il est donc plus qu’urgent d’entamer une réflexion conjointe entre les assureurs et les autorités pour réfléchir à une solution durable pour continuer à couvrir ces risques dans le futur.

L’amélioration de la situation passera inévitablement par une meilleure prévention des risques et une réelle anticipation des crises.  Le rôle de l’Etat est à ce point primordial mais une conscientisation des populations reste une nécessité absolue :

  • Réduire les impacts des phénomènes naturelles par une politique de prévention : améliorer la maitrise de l’aménagement du territoire en empêchant l’exposition des habitations aux risques naturels et diminuer la vulnérabilité des zones urbanisées ;
  • Meilleure connaissance des phénomènes : éviter l’installation des populations dans des zones ou les risques naturels sont prévisibles ;
  • Renforcer la surveillance et l’alerte : mettre en place des dispositifs permanents de surveillance en cas de phénomènes hydrologiques majeurs ;
  • Information préventive et éducation des populations : conscientiser les populations sur la nécessité d’apporter à leur bien des techniques de préservation et de prévention efficaces. Conscientiser sur la nécessité tant pour les bailleurs que leurs locataires de disposer de couvertures d’assurance complètes ;
  • Réduction des risques de collectivités : réalisation de travaux de protection des voies d’eaux (construction de digues dans les zones sensibles– nettoyage et curage récurrents des cours d’eau) ;
  • Anticipation des crises : élaboration de plan communaux de sauvegarde (mesures immédiates – consignes de sécurité – accompagnement des populations).

Vous souhaitez plus d’information ou vous posez des questions concernant un dossier sinistre inondation ?

Nos spécialistes assurance se tiennent à votre disposition pour vous conseiller efficacement, n’hésitez pas à nous contacter.

A très bientôt,

Baudouin Poncelet

Associé Maxel Assurance